À la ménopause, savez-vous que le risque cardiovasculaire augmente ? L’activité physique peut aider
La ménopause représente une période critique à partir de laquelle le risque cardiovasculaire (AVC, infarctus du myocarde…) augmente. Mais beaucoup de femmes l’ignorent. En prévention, une activité physique régulière peut se révéler bénéfique.
En France, les maladies cardiovasculaires représentent la première cause de mortalité chez les femmes, bien loin devant le cancer du sein.
Chaque année, elles emportent plus de 75 000 femmes, les décès par accidents vasculaires cérébraux (AVC) étant les plus fréquents. Pourtant, ces risques demeurent largement sous-estimés, tant par les femmes elles-mêmes que par une partie du corps médical.
L’une des périodes les plus critiques dans l’évolution du risque cardiovasculaire chez les femmes est la périménopause (période pendant laquelle les règles commencent à devenir irrégulières), ainsi que les années qui suivent la ménopause (arrêt des règles depuis plus de douze mois) et que l’on nomme « postménopause ».
Périménopause et postménopause, fenêtres de vulnérabilité cardiométabolique majeure
Trop souvent réduites à leurs symptômes les plus connus (bouffées de chaleur, troubles du sommeil, irritabilité), ces périodes sont en réalité des fenêtres de vulnérabilité cardiométabolique majeure pour les femmes.
En effet, les œstrogènes (hormones principalement produites par les ovaires) ont un effet protecteur sur le système cardiovasculaire et leur déclin progressif dès la périménopause impacte directement la santé cardiovasculaire. Conséquence : la pression artérielle tend à s’élever, le profil lipidique se détériore, la résistance à l’insuline (une hormone impliquée dans la régulation de la glycémie, ndlr) augmente, et la graisse abdominale s’installe plus facilement.
Autant de changements défavorables qui augmentent à moyen terme le risque d’événements cardiovasculaires chez les femmes.
Malgré l’importance du sujet, les femmes restent encore aujourd’hui sous-représentées dans les études cliniques portant sur les maladies cardiovasculaires et cérébrovasculaires. Ainsi, selon une étude récente publiée dans la revue scientifique Neurology, les femmes ne représentent qu’un tiers des participants dans les essais cliniques sur les AVC, ce qui limite la compréhension de cette pathologie chez elles et l’efficacité des stratégies de prévention et de traitement.
Le dispositif « Mon bilan prévention » à partir de 45 ans
La prévention du risque cardiovasculaire chez les femmes reste encore trop souvent tardive, alors que la ménopause devrait constituer un moment clé pour effectuer un bilan de santé global.
Ce besoin a, d’ailleurs, été souligné dans le Plan interministériel pour l’égalité entre les femmes et les hommes 2023-2027 qui intègre, pour la première fois, un objectif spécifique de prévention cardiovasculaire féminine, notamment à travers l’initiative « Mon bilan prévention ». Ce dispositif, destiné aux femmes à partir de 45 ans, viserait à détecter précocement les facteurs de risque cardiovasculaire, en tenant compte des spécificités liées au sexe et à l’âge.
C’est également une des propositions phares du rapport de la mission parlementaire sur la ménopause en France, publié en avril 2025, qui recommande explicitement d’inscrire la ménopause comme un moment stratégique pour renforcer la prévention cardiométabolique chez les femmes.
Des outils conçus pour les hommes, qui sous-évaluent le risque des femmes
Néanmoins, les outils actuellement utilisés pour estimer le risque cardiovasculaire reposent majoritairement sur des cohortes masculines. Ils ne prennent pas suffisamment en compte des facteurs spécifiques aux femmes, tels que la ménopause précoce, les symptômes vasomoteurs sévères (bouffées de chaleur, sueurs nocturnes), ou encore certains antécédents obstétricaux (prééclampsie, diabète gestationnel) ou gynécologiques (endométriose, syndrome des ovaires polykystiques).
Plus grave, les femmes sont plus sensibles que les hommes à plusieurs facteurs de risque traditionnels, comme l’hypertension artérielle, le diabète ou le tabagisme. Ces biais de conception des outils d’évaluation mènent à une sous-estimation du risque réel chez les femmes, ce qui peut entraîner des retards de diagnostic et de prise en charge.
Une récente initiative française, les « Bus du cœur des femmes », a d’ailleurs proposé un dépistage gratuit auprès de 4 300 femmes (âge médian : 54 ans), issues de 20 villes françaises, en prenant en compte ces différents facteurs de risque.
Les données récoltées montrent que plus de 70 % d’entre elles n’avaient jamais eu de consultation de prévention du risque cardiovasculaire au préalable, alors que 90,2 % présentaient au moins deux facteurs de risque cardiométabolique et 48,9 % des antécédents obstétricaux et/ou gynécologiques.
L’exercice physique : une intervention non médicamenteuse aux multiples bénéfices
En prévention, l’activité physique régulière peut se révéler extrêmement précieuse si elle est pratiquée conformément aux recommandations (cf. l’infographie de l’Observatoire national de l’activité physique et de la sédentarité [Onaps], ci-dessous).
Ses bénéfices sont multiples : amélioration de la composition corporelle (augmentation de la masse musculaire, réduction de la graisse abdominale), optimisation du profil lipidique sanguin, diminution de l’inflammation chronique de bas grade (mécanisme physiopathologique intracellulaire qui se développe à bas bruit, ndlr) et soutien à la santé mentale, notamment par la réduction des symptômes anxieux et dépressifs.
Nos travaux de recherche ont ainsi montré que les femmes ménopausées très actives physiquement n’ont pas de marqueurs de santé cardiométabolique altérés, contrairement à ce qui est généralement observé chez les femmes inactives (qui ne respectent pas les recommandations). Par ailleurs, certaines études suggèrent que l’activité physique régulière pourrait également atténuer les symptômes vasomoteurs, tels que les bouffées de chaleur ou les sueurs nocturnes, bien que ces effets restent à confirmer par des recherches complémentaires.
Les bénéfices du renforcement musculaire
Au sein du laboratoire Mobilité, vieillissement et exercice, nous avons également cherché à déterminer les modalités d’exercice les plus efficaces pour préserver la santé cardiovasculaire et les performances cognitives. Nos résultats indiquent que les exercices de renforcement musculaire, comme le gainage, la méthode Pilates ou les séances de type cuisses-abdos-fessiers, s’avèrent particulièrement bénéfiques pour la régulation de la pression artérielle, plus encore que les activités (dites « d’endurance ») qui sollicitent davantage le système cardiorespiratoire, comme la course à pied ou le vélo.
Les exercices de renforcement musculaire permettent notamment une réduction significative de la pression artérielle nocturne, un facteur de protection reconnu contre les événements cardiovasculaires.
Sur le plan cognitif, si l’effet immédiat de l’exercice sur les performances est relativement limité, nos données révèlent une augmentation de l’oxygénation du cortex préfrontal, une région clé pour la mémoire, l’attention et les fonctions exécutives. Cet effet est d’autant plus marqué chez les femmes présentant une bonne condition cardiorespiratoire, ce qui souligne l’importance d’un entraînement régulier et bien ciblé pour préserver la santé cérébrale à cette étape de la vie.
Ainsi, chez les femmes très actives (c’est-à-dire qui dépassent les recommandations), la ménopause ne s’accompagne pas d’une baisse des performances cognitives globales.
Prendre en compte les symptômes pour mieux prescrire l’activité physique
Autre enseignement important de ces études : les femmes présentant des symptômes vasomoteurs modérés à sévères tireraient un bénéfice accru de l’activité physique et notamment des exercices de renforcement musculaire. En effet, leur pression artérielle nocturne baisse de façon plus marquée après ce type d’exercices.
De plus, ces femmes ont tendance à moins pratiquer d’activité physique de loisir que celles dont les symptômes sont légers ou absents, un constat qui renforce la nécessité d’un accompagnement ciblé.
Vers une médecine préventive adaptée aux femmes
Nos résultats soulignent l’importance de repenser la prévention cardiovasculaire chez les femmes à la ménopause : elle ne peut plus se limiter à des messages généraux. Il s’agit d’intégrer pleinement l’activité physique comme un outil thérapeutique à part entière, avec une prescription adaptée au statut hormonal, mais également au profil symptomatique de chaque femme.
La ménopause ne devrait plus être considérée comme une étape dite « hormonale », mais comme une chance unique de prévention et de dépistage du risque cardiovasculaire des femmes.
L’exercice physique, simple, efficace et accessible, pourrait en être le pilier.
Pour aller plus loin :
Écoutez le podcast Bienvenue en Ménopausamie de l’association DisDameDonc.
Informations complémentaires
Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.